Grain de sel

Jusque là silencieuse par manque de temps et par souci de pudeur et de discrétion au cœur d'une situation qui a déjà fait couler beaucoup d'encre, j'ai été témoin de comportements qui m'ont finalement poussée à mettre mon grain de sel dans cet océan de sentiments humains qui tantôt me révoltent et tantôt forcent mon admiration.

Tout d'abord un triste constat : nombre de Français sont indisciplinés et capricieux. Impossible de les responsabiliser, la solution est donc la punition collective. Mais cela s'explique, bien sûr :

- Manque de confiance en nos dirigeants.
Epargnons-nous la liste des injustices dont nous sommes victimes en tant que citoyens ; trop longue, elle est connue de tous. En revanche, lorsque le chef de l'Etat conseille de nous tenir à une distance d'un mètre minimum les uns des autres alors que lui-même est en représentation dans un couloir étroit entouré d'une douzaine de praticiens sans la moindre protection sanitaire... La consigne ne paraît pas très sérieuse. Et des aberrations de cet ordre, il en existe des milliers ! (Oups, madame l'ex-ministre de la santé!...) Au final, le message perçu se résume à ceci : les "tout-puissants" sont au-dessus des lois et paradent librement, tandis que le "petit peuple" doit rester confiné sous peine d'amende. Où est l'égalité ? Plus question de liberté. Et la fraternité, n'en parlons pas ! Donc : comment appliquer les consignes d'une République dépouillée de ses valeurs par ceux censés la présider ?  
Hé bien, on ne les applique pas !
Pour notre part, nous respectons les règles de sécurité sanitaires non pas parce qu'on nous les impose, mais parce que nous avons une conscience. Ne pas se sentir soumis ou contraints, mais rester fidèles à notre bon sens et à nos propres convictions.

- Nous bénéficions de trop de confort, visiblement. Tandis que nous luttons contre un virus que l'on pourrait éradiquer relativement rapidement si nous étions respectueux des règles sanitaires, d'autres pays combattent au quotidien des fléaux bien plus atroces et sans espoir de les vaincre par manque de moyens médicaux, de terres cultivables, d'eau courante, d'argent... Relativisons. On ne nous demande pas de survivre à un environnement hostile jusqu'à la fin de nos jours, mais juste de faire quelques efforts et concessions durant plusieurs semaines pour vaincre un ennemi de passage.

- Nous ne côtoyons pas suffisamment la souffrance, sans doute...
Pour ma part, j'ai rendu chaque jour visite à un de mes proches confiné dans une chambre stérile durant un mois. Loin du confort de sa maison, sans plus aucune défense immunitaire, incapable de se nourrir, sous chimio, et malgré une souffrance physique atroce, il a fait preuve d'un énorme courage pour sortir au plus vite de sa quarantaine (sachant pourtant qu'il était condamné à très court terme).
Chaque jour des malades - et parmi eux beaucoup d'enfants - mènent ce genre de combat, loin de leurs proches, sans pouvoir les serrer dans leurs bras, et en étant victimes de douleurs que rien n'apaise. Par respect et admiration pour eux, faisons preuve d'un millième de leur courage en acceptant ce confinement, vraiment ridicule face à leur propre combat.

Nous sommes confinés, oui, mais chez nous et, pour beaucoup d'entre nous, entourés de nos proches. Nous sommes libres ! Libres de vaquer à toutes les occupations d'un quotidien que nous avons bâti, au sein d'un foyer que nous avons choisi. Et demain, nous savourerons d'autant plus de pouvoir gambader dans la campagne, fiers d'avoir surmonté nos peurs.

Et surtout : pensons aux soignants qui, eux, ne peuvent bénéficier de la protection du confinement. Ils vont au front, loin de leur famille, de leurs enfants.
En cette période, le confinement est un privilège, un confort, le meilleur soutien, la meilleure reconnaissance que l'on puisse offrir aux soignants qui font passer notre santé avant la leur, voire au détriment de la leur. Nous, nous pouvons rassurer nos enfants. Eux rassurent les enfants des autres tandis que les leurs tremblent pour eux.

La liberté est un état d'esprit qui passe par la conscientisation, l'intelligence, la sagesse, la solidarité et la capacité à apprécier tout ce que l'on possède (santé, famille, amis, passions, foyer, eau, chauffage...). Certains se demandent où dormir et comment se nourrir chaque jour, tandis que d'autres ont le culot de redouter d'être privés d'une balade sur la plage... ou de papier toilette ! 

- La psychose.
Parlons-en ! C'est un jeu en France de créer des psychoses au quotidien, de rendre les Français craintifs et hypocondriaques, de les bourrer d'infos catrastrophes pour les manipuler plus facilement, les affaiblir pour faire passer des lois injustes incognito.
Mais voilà, on récolte ce que l'on sème... Quand surgit une réelle catastrophe, les Français affaiblis paniquent outre mesure. Vident les stocks de paracétamol de manière totalement dingue ! Certains, pourtant en bonne santé, sollicitent même des spécialistes pour s'assurer d'être pris en charge si par malheur ils tombaient malades durant le confinement. Je me permets d'aborder le sujet car, personnellement, je devais avoir un soin dentaire pour une dent malade. Rendez-vous annulé. Hé bien, on s'adapte : bicarbonate et eau oxygénée pour éviter l'infection.
Ne pas céder à la panique. Prendre soin de soi et, seulement si les choses s'aggravent, contacter un professionnel. Mais ne pas incriminer les praticiens qui ont annulé vos rendez-vous : au contraire, saluer leur professionnalisme et leur respect des règles sanitaires.


Et PLUS QUATRE, alors ?

Nous sommes tous les six confinés chez nous. Et notre fils aîné vient d'ailleurs de fêter ses vingt ans en confinement.

Mais ça ne change pas grand-chose à notre quotidien. Hormis l'école et les balades au grand air, nous sortons très peu. Rester chez nous, en famille, est un bonheur qui nous est très précieux et que l'on savoure chaque jour depuis que Pierre et moi nous sommes rencontrés. On vit et on travaille ensemble, 24h/24.

En ces temps troublés, tout n'est pas simple évidemment. Des proches confinés parfois seuls dans leur propre logement nous manquent, et on craint bien sûr pour leur santé. Il faut s'adapter, sans stresser les enfants. Chose pas toujours évidente entre les incendies en Australie, les usines chimiques qui explosent, les maladies auto-immunes en augmentation, les catastrophes climatiques... Encore une fois, la liste est beaucoup trop longue ! (Et en tant que parents, il faut aller au-delà de notre propre culpabilité d'avoir enfanté dans ce monde effrayant.)

Donc on fait le CE1 joyeusement à la maison, avec l'aide d'une super instit' qui nous envoie chaque jour les consignes de travail, et la motivation de nos jumeaux de six ans au top pour nous expliquer le fonctionnement de leur classe.
Ecole à la maison
Les deux grands bossent par visioconférence. Et ils ne ménagent par leurs efforts pour garder le niveau et obtenir des résultats qui leur permettront d'assurer l'avenir dont ils rêvent. Face à leur courage et à leur niaque, tout nous paraît plus simple en tant que parents.
Notre force naît de l'admiration et de l'amour que nous inspirent nos proches. C'est un cercle vertueux. 

En confinement, on manque de temps ! C'est pire que d'habitude, bien qu'on ne sorte plus.
Niveau organisation, cela fait plusieurs mois que l'on s'applique à produire moins de déchets et zéro gaspi. On a donc quelques matières premières pour fabriquer la lessive, les produits ménagers, le pain, des biscuits sans conservateurs ni ajouts de substances nocives pour la santé.

Cette période sera bénéfique à ceux qui visent un comportement plus écolo et responsable. C'est le moment de repenser notre façon de consommer. Plus simplement, en gaspillant moins.
Chez  nous, on ne jette jamais de nourriture, on accommode les restes. Nous sommes adeptes du recyclage et du bio au jardin, du potager intelligent et zéro traitement, de la permaculture. Les beaux jours arrivent, c'est le moment d'approfondir nos connaissances en la matière et d'expérimenter de nouvelles choses !

Pour amuser les enfants, on se la joue "Koh Lanta". Nous sommes loin du monde, sur une île déserte et, pour éviter de sortir dans la jungle hostile, on cuisine au mieux la nourriture de nos placards. Sans restrictions mais en prenant conscience des besoins que nous avons. Et le plaisir est d'autant plus grand que l'on savoure le nécessaire énergétique.
Photo prise par une amie sur sa terrasse :-)
En raison d'une quantité exorbitante de produits dans les supermarchés, dont un nombre incroyable de préparations industrielles, certains mangent par pulsion, non par raison. Boudez la purée Mousseline et écrasez des pommes de terre avec une noisette de beurre, c'est moins coûteux et c'est meilleur ;-)

C'est le moment de savourer.

Je vous dirais bien aussi que c'est le moment de lire, mais on va croire que je fais de l'auto-promo... Bon, allez, je le dis : lisez ! ;-)  D'ailleurs, je vous causerai bientôt d'un livre génial, plein d'optimisme et de sagesse : Shinrin-Yoku.
De se mettre devant Youtube pour un cours de Yoga avec les enfants. C'est hyper drôle et ludique, un joyeux moment de complicité qui nous détend. De dessiner, de tenir un journal de quarantaine, pourquoi pas ! D'y coucher toutes vos réflexions, vos peurs, vos prises de conscience, vos rêves... D'y assumer ou d'y découvrir votre intime. De prendre des résolutions plus efficaces que celles du nouvel an :-)
De nourrir les oiseaux et de les photographier. Car ça fait sacrément du bien au moral de constater que le printemps est là ! 

Photos prises par Sous le Chapeau


Alors oui. Pas d'œillères ! Des gens souffrent, des gens meurent. Mais c'est le cas depuis toujours, bien avant le covid 19. Des drames se jouent chaque jour en silence, dans les hôpitaux, dans les foyers, sur les routes... Pour une, deux, dix personnes, pour des peuples entiers. Certains d'entre nous ont déjà vécu des drames, et nous en vivrons tous. Mais on n'a pas le choix. On est ici pour le meilleur et pour le pire, et si on tient à y rester au maximum, on doit avancer en se nourrissant de choses positives. En savourant nos richesses les plus infimes, car comme je me le répète souvent :

 Le malheur défonce nos portes. Mais le bonheur n'entre que si on l'y invite.

Et... Oui, la situation va s'aggraver dans les jours à venir. On nous le répète et on s'en doute. Mais justement, prenez-soin de vous, dans le respect des autres. Pensez à appeler vos proches confinés seuls chez eux, pour les soutenir, faire des projets heureux avec eux. Et invitez au maximum toutes les petites joies qui vous entourent et auxquelles vous n'avez pas encore pris le temps d'accorder votre attention ! Se nourrir de positif nous aidera à surmonter ensemble ces heures noires qui nous attendent.

Audrey